Les batailles du ProphĂšte
Contexte
Selon la tradition islamique, Muhammad nâest pas seulement un prophĂšte venu apporter la derniĂšre « rĂ©vĂ©lation ». Il est aussi un chef de guerre et un conquĂ©rant. Les rĂ©cits de ses batailles, de ses raids et de ses razzias se comptent en effet par dizaines, et les thĂ©ologiens musulmans vantent autant ses vertus prophĂ©tiques que son aptitude au combat. La dimension guerriĂšre du ProphĂšte est mĂȘme exemplifiĂ©e dans la littĂ©rature musulmane, qui dĂ©crit avec minutie ses opĂ©rations militaires, ses tactiques de guerre, ses armes, etc. Cet article dâintroduction a pour objectif de donner une perspective globale sur les batailles du ProphĂšte et de rĂ©pondre aux principales questions qui se posent : pour quelle(s) raison(s) Muhammad a-t-il entrepris autant dâopĂ©rations ? Sâagit-il dâĂ©vĂ©nements historiques ?
Un prophÚte armé
Les récits des batailles prophétiques
Selon les sources islamiques, la carriĂšre prophĂ©tique de Muhammad sâest dĂ©roulĂ©e en deux temps : (1) la pĂ©riode mecquoise (610 â 622) au cours de laquelle lui et ses premiers compagnons forment une communautĂ© marginalisĂ©e et vulnĂ©rable, qui fait lâobjet dâhumiliations en tous genres de la part des Quraychites ; (2) la pĂ©riode mĂ©dinoise (622-632), qui voit la jeune communautĂ© se renforcer au grĂ© des alliances et des ralliements. Le ProphĂšte devient alors un chef de guerre et entreprend un certain nombre dâopĂ©rations militaires pour Ă©tendre son pouvoir politique et amasser des ressources matĂ©rielles.
Les rĂ©cits de ces opĂ©rations militaires sont rapportĂ©s dans des ouvrages spĂ©cialisĂ©s quâon appelle les maghĂązĂź. Le premier ouvrage du genre, en tout cas le premier qui nous soit parvenu, est celui de lâhistorien al-Waqidi (m. 823), composĂ© Ă la demande du calife1. Les traditions sur les batailles du ProphĂšte sont cependant plus anciennes, et devaient exister au moins sous une forme orale dĂšs la fin du 7e siĂšcle2. En dehors des maghĂązĂź, les rĂ©cits des batailles occupent une bonne place Ă©galement dans les nombreuses biographies du ProphĂšte, ainsi que dans les recueils de hadĂźths. Al Bukhari (m. 870) y consacre lâun des chapitres les plus denses de son cĂ©lĂšbre Sahih, de mĂȘme que le traditionniste Muslim ibn al-HajjĂąj (m. 875).
La question se pose, comme Ă chaque fois lorsque lâon traite des sources islamiques, de lâhistoricitĂ© des rĂ©cits quâelles rapportent. A-t-on affaire Ă des Ă©vĂ©nements historiques ou bien Ă des fictions littĂ©raires ? Pour rĂ©pondre Ă la question, il conviendrait dâexaminer au cas par cas les batailles mentionnĂ©es dans les sources et de dĂ©terminer pour chacune dâentre elles leur degrĂ© dâhistoricitĂ©. Ce que lâon peut dire toutefois, câest quâil nây a aucun doute quant au fait que Muhammad a menĂ© des opĂ©rations militaires visant Ă consolider son pouvoir politique et/ou augmenter ses ressources Ă©conomiques. Certaines de ses incursions en Palestine sont mĂȘme rapportĂ©es dans les sources non islamiques3. Par ailleurs, on possĂšde un tĂ©moignage Ă©crit vers 6704, qui semble confirmer les activitĂ©s militaires de Muhammad. Dans ce texte, intitulĂ©Â Doctrina Jacobi, un marchand juif reçoit une lettre de son frĂšre Abraham, qui lâinforme avoir fait la rencontre dâun vieil homme chrĂ©tien Ă Sykamina, une ancienne citĂ© cĂŽtiĂšre de Palestine. Abraham interroge ce dernier Ă propos « dâun prophĂšte apparu avec les Sarrasins ». Le vieillard lui rĂ©pond immĂ©diatement : « Câest un faux prophĂšte ! Les prophĂštes ne viennent pas avec Ă©pĂ©e et char de guerre »5. Quâun texte aussi ancien tĂ©moigne des activitĂ©s militaires de Muhammad est un indice trĂšs fort en faveur de leur historicitĂ©.
En revanche, les sources islamiques ont trĂšs probablement transformĂ©, voire inventĂ© les rĂ©cits de ces opĂ©rations militaires. Lâimage dâun prophĂšte-guerrier commence Ă Ă©merger dans les sources vers la fin du 7e siĂšcle6, dans un contexte dâexpansion territoriale de lâempire arabe, qui avait tout Ă gagner Ă prĂ©senter Muhammad comme un chef de guerre afin de lĂ©gitimer ses propres conquĂȘtes, et dâencourager les Croyants Ă sâinscrire dans les pas du « modĂšle » prophĂ©tique. La dimension guerriĂšre de Muhammad sâest ensuite amplifiĂ©e tout au long des 8e et 9e siĂšcles. Certains faits dâarmes, quâon ne connaissait pas jusquâalors, font subitement leur apparition. De maniĂšre paradoxale, plus on sâĂ©loigne de lâĂ©poque du ProphĂšte, plus les rĂ©cits sur ses batailles gagnent en dĂ©tails et en prĂ©cision, ce qui doit naturellement alerter sur leur fiabilitĂ©7. Pour donner un ordre dâidĂ©e, la collection de hadĂźths attribuĂ©e Ă âAbd al-Razzaq, Ă©crite au 8e siĂšcle, contient 91 narrations sur les guerres de Muhammad. Un siĂšcle plus tard, al-Bukhari en mentionne 402 dans son recueil8. Dans le laps de temps, de nombreuses narrations avaient Ă©tĂ© inventĂ©es, soit pour combler les silences Ă lâintĂ©rieur de rĂ©cits existants, soit pour rĂ©pondre Ă des besoins dâordre politique, juridique ou exĂ©gĂ©tique. Câest donc avec la plus grande prudence quâil convient de lire et dâanalyser les rĂ©cits sur les batailles du ProphĂšte, en gardant Ă lâesprit, comme le souligne Ayman Ibrahim, que « les sources arabes visent Ă Â reprĂ©senter ce que leurs auteurs pensaient, ou voulaient transmettre, plutĂŽt quâĂ rapporter ce qui sâest rĂ©ellement passĂ© au dĂ©but de la pĂ©riode islamique »9.
La légende noire du ProphÚte
Quelle que soit lâhistoricitĂ© des informations transmises, il reste indĂ©niable que les sources islamiques reprĂ©sentent Muhammad comme un guerrier. Certes, le cumul des fonctions de prophĂšte et de chef militaire nâest pas une nouveautĂ©. AprĂšs tout, MoĂŻse est dĂ©crit parfois comme un commandant de guerre dans la Bible10. Cependant, la frĂ©quence des guerres menĂ©es par Muhammad, et la place quâelles occupent Ă lâintĂ©rieur de sa communautĂ©, ne trouvent Ă notre connaissance aucun Ă©quivalent dans le monde religieux de lâAntiquitĂ©. Ă tel point que trĂšs tĂŽt se dĂ©veloppe une lĂ©gende noire qui dĂ©peint le prophĂšte de lâislam comme un homme barbare et violent. Au 9e siĂšcle, le thĂ©ologien NicĂ©tas de Byzance sâadresse ainsi directement Ă Muhammad : « MoĂŻse, outre quâil Ă©tait un lĂ©gislateur, est aussi un prophĂšte, et de sa prophĂ©tie nous voyons les effets quotidiens ; mais de toi, quâadmirons-nous ? les dĂ©bauches ? les massacres ? les incendies ? les pillages ? [âŠ] »11. Plus tard, câest au tour de Voltaire de reprendre la lĂ©gende noire de Muhammad, dont il dĂ©nonce lâintolĂ©rance supposĂ©e : « quâil mette son pays Ă feu et Ă sang pour faire respecter ce livre ; quâil coupe les gorges des pĂšres et ravisse les filles ; quâil donne au vaincu le choix entre sa religion et la mort ; voilĂ ce quâĂ coup sĂ»r aucun homme ne peut excuser »12.Â
Cette image du ProphĂšte, auquel on accole toutes sortes de qualificatifs pĂ©joratifs (« barbare », « sanguinaire », « guerrier », etc.) est encore rĂ©pandue de nos jours, surtout chez les critiques de lâislam. Lâaccusation est en partie biaisĂ©e car elle ne prend pas en compte le contexte de lâĂ©poque â Ă ce titre, la plupart des philosophes de lâAntiquitĂ© seraient eux aussi des « barbares » compte tenu de leur position sur lâesclavage. Il est vrai toutefois quâun prophĂšte nâest pas un philosophe, et que Muhammad est considĂ©rĂ© par les musulmans comme un « excellent modĂšle », supposĂ© prĂ©valoir en tous lieux et Ă toutes les Ă©poques.
De plus, lâimage dâun prophĂšte violent est tirĂ©e des sources que nous ont transmis les historiographes musulmans eux-mĂȘmes. Ce nâest donc pas quelque chose de tout Ă fait Ă©tranger Ă la rĂ©alitĂ© telle quâelle apparait dans les sources, mĂȘme si lâinterprĂ©tation quâon en fait peut bien sĂ»r ĂȘtre diffĂ©rente. Ce qui est considĂ©rĂ© chez les uns comme un crime odieux peut ĂȘtre vu par les autres comme un acte de lĂ©gitime dĂ©fense, une dĂ©monstration de force, ou encore un ordre dâAllĂąh. Cependant, certains faits sont tĂȘtus et ne se prĂȘtent pas au jeu des interprĂ©tations. Que dire, par exemple, au sujet de la dĂ©capitation, dĂ©cidĂ©e par le ProphĂšte, de plusieurs centaines de juifs de MĂ©dine (voir ci-dessous), que le penseur tunisien Hichem DjaĂŻt (m. 2021) qualifiera mĂȘme de « boucherie »13 ?
Les expéditions du prophÚte
Les historiographes musulmans ont classifiĂ© les batailles en deux catĂ©gories. Dâune part, celles que le ProphĂšte a dirigĂ©es en personne : il sâagit soit dâun raid (en arabe ghazwa, qui a donnĂ© le français « razzia »), soit dâune campagne militaire (maghzĂą, pl. maghĂązĂź). Dâautre part, les opĂ©rations auxquelles Muhammad nâa pas participĂ©, mais quâil a commanditĂ©es en nommant Ă sa tĂȘte un responsable. Il sâagit gĂ©nĂ©ralement dâopĂ©rations de moindre envergure comme une incursion (sariyya), une opĂ©ration commando (baÊżtha), ou encore une mission dâespionnage (liwĂą).
Concernant le nombre de batailles menĂ©es par le ProphĂšte, les sources islamiques sont comme trĂšs souvent remplies de contradictions, et ne parviennent Ă aucun accord. Ibn Hicham (m. 833) compte vingt-sept opĂ©rations de ce type dans sa Sira Rasul Allah, alors quâAl-Asbahani (m. 979) en mentionne seulement vingt-et-une. Al-BayhaqĂź (m. 1066) en dĂ©nombre dix-neuf, ce qui rejoint lâopinion dâal-Dhahabi dans son Tarikh al islam, mais ce dernier Ă©voque Ă peine quelques pages plus loin le nombre de vingt-trois expĂ©ditions ! La chronologie des opĂ©rations militaires du ProphĂšte fait elle aussi lâobjet de nombreuses contradictions.
Un historien amĂ©ricain, John M. B. Jones, a eu accĂšs Ă un manuscrit original du British Museum qui contient une Ă©dition complĂšte du Livre des expĂ©ditions dâal Waqidi. Il a pu dresser une liste chronologique de ces raids, expĂ©ditions, opĂ©rations punitives et assassinats. Malheureusement, elle ne correspond pas exactement aux donnĂ©es des autres sources. Il sâagit nĂ©anmoins de la meilleure vision dâensemble que lâon puisse avoir de ces activitĂ©s, telles quâelles ressortent en tout cas des Ă©crits dâal Waqidi. Au total, Muhammad aurait menĂ© ou commanditĂ© quatre-vingt-cinq opĂ©rations militaires sur une pĂ©riode de 10 ans, soit quasiment une opĂ©ration par mois. Nous reproduisons ci-dessous la liste dressĂ©e par Jones14.
Liste chronologique des opérations militaires de Muhammad
1. Raid de Hamza sur la cĂŽte
2. Rabigh
3. Al-Kharrar
4. Al-Abwa
5. Buwat
6. Badr al Ula
7. Al Ushayra
8. Nakhla
9. Badr
10. Assassinat dâAsma bint Marwan
11. Assassinat dâAbĂ» Afak
12. Expulsion des BanĂ» Qaynuqa
13. Al-Sawiq
14. Qaraqat al-Kudr
15. Assassinat de Kaâb al-Ashraf
16. Dhu Amarr
17. Buhran
18. Al-Qarada
19. Uhud
20. Hamra al-Asad
21. Qatan
22. Bir Mauna
23. Al-Raji
24. Expulsion des BanĂ» Nadir
25. Badr al-Mawid
26. Assassinat dâAbu Rafi
27. Dhat al Riqa
28. Dumat al-Jandal
29. Al-Muraysi I
30. Al-Muraysi II
31. Al-Khandak
32. Extermination des BanĂ» Qurayza
33. Assassinat de Sofyan ibn Khalid
34. Al-Qurta
35. Banu Lihyan I
36. Banu Lihyan II
37. Al-Ghaba
38. Al-Ghamr
39. Dhul Qassa I
40. Dhul Qassa II
41. BanĂ» Sulaym
42. Al-Is
43. Al-Taraf
44. Hisma
45. Wadil Qura
46. Dumat al-Jandal
47. Fadak
48. Assassinat dâUmm Qirfa
49. Assassinat dâUsayr ibn Razim
50. BanĂ» Urayna
51. Al-Hudaybiyya
52. Khaybar
53. Turba
54. Najd
55. Fadak
56. Al-Mayfa
57. Al-Jinab
58. Umrat al-Qadiya
59. Banpu Sulaym
60. Al-Kadid
61. Dhat Atlah
62. Al-Sij
63. Muta
64. Dhat ak-Salasil
65. Al-Khabat I
66. Al-Khabat II
67. Al-Kadhira
68. Idam
69. ConquĂȘte de La Mecque
70. BanĂ» Jadhima
71. Hunayn
72. Al-Taâif
73. Al-Jirana
74. Banpu Tamim
75. Khatam
76. Al-Qurta
77. Raid contre les Abyssins
78. Destruction du sanctuaire dâal-Fals
79. Tabuk
80. Dumat al-Jandal II
81. Hijjat Abu Nakr
82. Najran
83. Ali au YĂ©men
84. Hijjat al-Wada
85. Usama ibn Zayd en Syrie
Des batailles avant tout défensives ?
Quelles sont les raisons qui ont poussĂ© Muhammad Ă entreprendre autant dâopĂ©rations militaires en si peu de temps ? Lâexplication qui ressort le plus souvent chez les auteurs musulmans contemporains est que les opĂ©rations diligentĂ©es par le ProphĂšte Ă©taient de nature dĂ©fensive, ou quâelles visaient Ă dĂ©jouer de possibles attaques venant des troupes adverses. Câest ce que soutient par exemple le prĂ©dicateur Tariq Ramadan, qui Ă©crit dans sa biographie du ProphĂšte que « dorĂ©navant, il convenait non plus de rĂ©sister passivement, mais de se dĂ©fendre face aux agressions de lâennemi », avant de mettre en avant « la nĂ©cessaire rĂ©sistance par les armes, la lĂ©gitime dĂ©fense, face Ă lâoppresseur »15.
Ce type de discours a clairement un agenda apologĂ©tique visant Ă prĂ©senter les opĂ©rations militaires de Muhammad sous un jour compatible avec les normes des sociĂ©tĂ©s modernes. Toutefois, il ne rĂ©siste pas Ă lâexamen des sources. Les auteurs musulmans de la pĂ©riode prĂ©moderne, qui ne sâembarrassaient pas dâautant de prĂ©cautions, avaient un point de vue diamĂ©tralement opposĂ©. Pour eux, les batailles du ProphĂšte Ă©taient un ordre dâAllĂąh, et leur objectif Ă©tait de propager la foi musulmane auprĂšs des incroyants au moyen du combat sacrĂ© (jihĂąd)16. Cette opinion sâappuie notamment sur le fameux « verset du sabre » (9:5), censĂ© abroger toutes les dispositions prĂ©cĂ©dentes plus favorables envers les non-musulmans. On cite Ă©galement la tradition prophĂ©tique suivante qui ne laisse place Ă aucune ambiguĂŻtĂ© :
On mâa ordonnĂ© de combattre les hommes jusquâĂ ce quâils disent : « il nây a de dieu quâAllah et Muhammad est le Messager dâAllah », et quâils accomplissent la priĂšre et payent lâaumĂŽne. Sâils font cela, alors ils sauveront leurs vies et leurs biens de moi »17.
Ce hadĂźth met Ă mal lâhypothĂšse selon laquelle les guerres entreprises par Muhammad Ă©taient de nature dĂ©fensive. Ce point de vue se trouve en fait contredit par les sources musulmanes elles-mĂȘmes. Comme le souligne Ibrahim, qui a procĂ©dĂ© Ă lâanalyse de ces sources, « il parait Ă©vident que la plupart des expĂ©ditions nâĂ©taient pas dĂ©fensives »18. Ibrahim note au total quatre objectifs derriĂšre les guerres menĂ©es par Muhammad : (1) Ă©tendre la domination politique des musulmans en terrorisant les ennemis mecquois ; (2) enrichir la communautĂ© musulmane grĂące aux ressources dĂ©robĂ©es Ă leurs ennemis lors des raids militaires ; (3) entrainer et prĂ©parer les musulmans Ă des incursions plus importantes dans le but dâĂ©tendre leur domination sur lâArabie ; (4) affaiblir politiquement et Ă©conomiquement les Quraychites19. Bref, les motivations ne relevaient ni de la lĂ©gitime dĂ©fense, ni mĂȘme de la volontĂ© de convertir les incroyants Ă la foi musulmane. Les motivations de Muhammad Ă©taient avant toute autre chose politiques et matĂ©rielles. On en a lâillustration dans la fameuse bataille de Badr, qui se serait produite peu de temps aprĂšs lâĂ©migration Ă MĂ©dine. Muhammad ayant Ă©tĂ© informĂ© du passage dâune caravane appartenant Ă ses adversaires de La Mecque, il dĂ©cida dâorganiser contre elle une razzia. LorsquâAbĂ» SufyĂąn, qui dirigeait la caravane, apprit la nouvelle, il changea de trajectoire et fit tout ce qui Ă©tait possible pour Ă©viter lâaffrontement20.
Ibn HichĂąm raconte que les hommes du ProphĂšte sâĂ©taient dâabord montrĂ©s rĂ©ticents Ă lâidĂ©e de sâengager dans la bataille car ils « pensaient quâun apĂŽtre dâAllĂąh ne crĂ©erait pas de guerre »21. Pour encourager ses troupes, Muhammad leur promet alors une partie du butin, ce qui aura son effet22. Le caractĂšre offensif de la bataille, qui semble avoir surpris jusquâaux hommes de Muhammad, apparait donc trĂšs clairement dans cet exemple.
Lâart de la guerre
Câest bien connu, la guerre est avant tout une affaire de stratĂ©gie. Le ProphĂšte lâavait bien compris, qui dĂ©clara dâaprĂšs un hadĂźth consignĂ© par al-Bukhari : « la guerre, câest la ruse »23. De fait, les sources musulmanes rapportent que Muhammad avait recours Ă toutes sortes de stratagĂšmes pour prendre le dessus sur lâennemi, telles que les attaques surprises. La tribu des BanĂ» Moustaliq en fera les frais dâaprĂšs cet autre hadĂźth : « le ProphĂšte a attaquĂ© les BanĂ» Moustaliq, tandis quâils Ă©taient insouciants et abreuvaient leur bĂ©tail avec de lâeau. Leurs combattants ont Ă©tĂ© tuĂ©s, et leurs femmes et leurs enfants pris comme captifs »24. Toujours pour surprendre lâadversaire, Muhammad privilĂ©giait les attaques de nuit, et assumait de devoir tuer Ă cette occasion des femmes et des enfants innocents25.
Une autre stratĂ©gie quâaffectionnait le ProphĂšte consistait Ă terroriser ses ennemis. Il en avait mĂȘme fait lâun des signes distinctifs de son apostolat si lâon en croit un hadĂźth sauvegardĂ© par al-Bukhari :
Jâai Ă©tĂ© distinguĂ© d’entre les ProphĂštes par six faveurs : J’ai eu le don de la parole exhaustive quoique brĂšve. Je triomphe par la terreur. Le butin m’a Ă©tĂ© rendu licite. Toute la terre m’a Ă©tĂ© offerte comme moyen de purification et un lieu de priĂšre. J’ai Ă©tĂ© envoyĂ© Ă l’humanitĂ© entiĂšre. Enfin, je suis le dernier des ProphĂštes26.
Une autre tradition prĂ©serve les paroles suivantes attribuĂ©es Ă Muhammad : « jâai Ă©tĂ© envoyĂ© pour frapper les cous et enchaĂźner solidement les prisonniers »27. En outre, les sources islamiques rapportent de nombreux rĂ©cits oĂč le ProphĂšte et ses hommes cherchent dĂ©libĂ©rĂ©ment Ă provoquer la terreur chez leurs adversaires. Le juriste AbĂ» YaâlĂą a rapportĂ© dans son Musnad la tradition dans laquelle Muhammad adresse la menace suivante aux membres du sa tribu : « Ă peuple de Qoraych ! Par celui qui dĂ©tient mon Ăąme entre ses mains ! Je ne suis venu Ă vous quâavec lâĂ©gorgement ! Et il a fait le signe de la main sous la gorge »28. Sâajoutent Ă cela des assassinats commanditĂ©s contre des hommes et des femmes qui se moquaient de lui ou du Coran. On citera Ă titre dâexemples les poĂštes dĂ©capitĂ©s, ou encore le terrible supplice dâUmm Qirfa, qui a fini Ă©cartelĂ©e pour avoir critiquĂ© Muhammad29. La scĂšne de terreur la plus emblĂ©matique reste cependant le sort infligĂ© aux BanĂ» Qurayza. Muhammad avait ordonnĂ© de dĂ©capiter tous les mĂąles pubĂšres de cette tribu juive de MĂ©dine avant de jeter leurs cadavres dans une fosse et de rĂ©duire en esclavage les femmes et les garçons non pubĂšres. On parle au total de 600 Ă 900 hommes exĂ©cutĂ©s, et dâenviron un millier dâesclaves30. Cet Ă©vĂ©nement sâinscrit de toute Ă©vidence dans la stratĂ©gie de terreur qui avait Ă©tĂ© mise en place par Muhammad dâaprĂšs les sources islamiques.
Les armes du ProphĂšte
Comme tous les bons soldats, Muhammad avait ses armes fĂ©tiches, dont les ouvrages postĂ©rieurs nous livrent tous les dĂ©tails. Les auteurs musulmans ont en effet dressĂ© de nombreuses listes dâarmes qui auraient appartenu au ProphĂšte, et certains ont mĂȘme consacrĂ© des chapitres entiers Ă la question. Dans sa biographie prophĂ©tique, Al-Dhahabi (m. 1348) dĂ©die une section intitulĂ©e « les armes du ProphĂšte Muhammad, son armure, et autres Ă©quipements de guerre ». LâencyclopĂ©die dâIbn Saâd (m. 845) contient Ă©galement plusieurs entrĂ©es consacrĂ©es Ă son armure, ses lances, ses boucliers, etc.Â
Les arcs
Les sources musulmanes indiquent que Muhammad possĂ©dait toute une collection dâarcs. Cette arme, utilisĂ©e pour le combat Ă distance, Ă©tait dĂ©jĂ connue des Arabes de lâAntiquitĂ©, comme le montrent les inscriptions de lâĂ©poque31.
Ibn Saâd rapporte dans ses Tabaqat que le ProphĂšte possĂ©dait trois arcs, pris comme butin aux BanĂ» Qaynuqa :
LâapĂŽtre d’Allah a pris parmi les armes des BanĂ» Qaynuqa trois lances et trois arcs. Le nom dâun des arcs est al Rawha, lâautre, en bois de shawat, Ă©tait al Bayda, lâarc jaune sâappelait al Safra, parce quâil Ă©tait en bois de nada32.
Dans les hadĂźths, lâarc est citĂ© de façon rĂ©guliĂšre et fait lâobjet de tous les Ă©loges de la part de Muhammad, qui en attribue lâusage Ă IsmaĂ«l, lâancĂȘtre mythique des Arabes : « Ă descendance dâIsmaĂ«l ! EntraĂźnez-vous Ă lâarc, parce que votre pĂšre Ă©tait un grand archer »33. An-Nasaâi a en outre rĂ©pertoriĂ© dans ses Sunan la tradition suivante : « Celui qui tire une flĂšche pour la cause dâAllah et atteint sa cible, cela lâĂ©lĂšvera dâun niveau au paradis »34. Et selon une autre tradition consignĂ©e par Muslim, Muhammad sâadressa Ă ses hommes en ces termes : « prĂ©parez-vous Ă les rencontrer avec toute la force que vous avez. Faites attention : la force est dans les arcs et les flĂšches. Faites attention : la force est dans les arcs et les flĂšches. Faites attention : la force est dans les arcs et les flĂšches »35.
Cette insistance sur la « force » et les mĂ©rites de lâarcherie est aux antipodes de la conception que sâen faisaient les Grecs, qui considĂ©raient cette arme comme « lâinstrument des lĂąches »36.
DâaprĂšs les sources islamiques, lâarc est lâune des armes les plus en usage chez les soldats de Muhammad, et servait rĂ©guliĂšrement Ă Ă©liminer les adversaires. Al-Tabari rapporte dans son Histoire des prophĂštes et des rois le rĂ©cit suivant : Muhammad avait confiĂ© Ă lâun de ses compagnons, Amr bin Umayyah, la mission dâassassiner AbĂ» Sufyan. Sur la route, le mercenaire sâarrĂȘta dans une grotte et raconte une scĂšne digne dâun film dâĂ©pouvante :
Je suis entrĂ© dans une grotte avec mon arc et mes flĂšches. Un borgne de grande taille, de la tribu des Banu al Dil Banu Bakr est entrĂ© plus tard avec ses moutons. Il demanda : ââQui est lĂ ?ââ et jâai rĂ©pondu : ââQuelquâun de la tribu des Banu Bakrââ. Il dit : ââJe suis aussi des Banu Bakr, un des Banu al Dilââ. Il sâallongea prĂšs de moi, et se mit Ă chanter :
Je ne serai pas musulman autant que je vivrai,
et je ne croirai pas en la foi des musulmans.
Jâai dit alors : ââCâest ce quâon va voir !ââ Le bĂ©douin sâendormit et se mit Ă ronfler. Je suis allĂ© vers lui, et je lâai tuĂ© de la façon la plus atroce comme jamais personne nâa Ă©tĂ© tuĂ©. Je me suis allongĂ© sur lui, jâai mis le bout de mon arc dans son Ćil valide et jâai appuyĂ© si fort quâil sâenfonça jusquâĂ la base du cou. Ensuite, je suis sorti dehors comme une bĂȘte sauvage, jâai repris la route comme un aigle, fuyant pour ma vie37.
Les épées et les sabres
Parmi lâimposante collection dâarmes du ProphĂšte, le sabre occupe une place de premier plan. On raconte en effet quâil en possĂ©dait sept ou plus selon les versions38. Le premier Ă©tait un hĂ©ritage de son pĂšre quâil lĂ©gua Ă son tour Ă son gendre Ali. Les autres avaient Ă©tĂ© dĂ©robĂ©s par Muhammad Ă ses adversaires. Lâune de ces Ă©pĂ©es, dĂ©robĂ©e Ă une tribu juive, est surnommĂ©e « lâĂ©pĂ©e des prophĂštes ». DâaprĂšs la lĂ©gende, elle aurait dâabord appartenu Ă David, qui lâutilisa lors de son combat contre Goliath, et serait ensuite passĂ©e entre les mains des prophĂštes qui lui ont succĂ©dĂ© jusquâĂ JĂ©sus39. Tout au long de lâhistoire islamique, lâĂ©pĂ©e occupera un rĂŽle important, non seulement dans le combat sacrĂ© (jihĂąd), mais encore dans lâimaginaire collectif. Câest lâarme par excellence du combattant musulman et la porte dâentrĂ©e du paradis dâaprĂšs un cĂ©lĂšbre hadĂźth qui fait dire Ă Muhammad que « le paradis se trouve Ă lâombre des Ă©pĂ©es »40. On peut dĂ©couvrir au MusĂ©e du Palais de Topkapi, situĂ© Ă Istanbul, plusieurs Ă©pĂ©es qui auraient appartenu au ProphĂšte (voir Fig. 1 ci-dessous). Lâemploi du conditionnel est ici trĂšs important, car en lâabsence de vĂ©ritable Ă©tude sur ces prĂ©tendues reliques, il est impossible dâĂ©tablir leur authenticitĂ©. De ce que nous en savons, il est cependant Ă peu prĂšs certain quâil sâagit de faux. Deux historiens ont pu accĂ©der Ă la collection du MusĂ©e, mais sans obtenir lâautorisation de procĂ©der Ă un examen plus approfondi. Voici ce quâil en ressort :
Â
Le groupe dâĂ©pĂ©es et de sabres conservĂ© actuellement dans le TrĂ©sor du ProphĂšte au MusĂ©e du Palais de Topkapi Ă Istanbul n’avait de son cĂŽtĂ© jamais Ă©tĂ© vraiment Ă©tudiĂ© de façon critique et approfondie et nâa pu lâĂȘtre encore cette fois-ci. Les objets Ă©tant en effet considĂ©rĂ©s comme sacrĂ©s, il nous a Ă©tĂ© impossible de les toucher pour les besoins de notre travail. Il nâen rĂ©sulte pas moins de notre Ă©tude, mĂȘme approximative, que sauf dans le cas dâobjets attribuĂ©s au dernier calife abbasside, aucune des piĂšces figurant dans ce groupe ne rĂ©siste Ă une analyse typologique et Ă©pigraphique poussĂ©e et ne peut dater effectivement de la pĂ©riode Ă laquelle on lâattribue, mĂȘme sâil sâagit pour certains de piĂšces trĂšs anciennes, parmi les plus anciennes connues Ă ce jour41.

Fig. 1 : collection dâĂ©pĂ©es attribuĂ©es Ă Muhammad â MusĂ©e de Tokkapi (Istabul)
Conclusion
Les sources islamiques dĂ©crivent Muhammad comme un guerrier prolifique, qui aurait entrepris en moyenne tous les quarante jours une nouvelle opĂ©ration militaire. Lâimage est probablement grossie â elle servait les ambitions expansionnistes du califat abbasside durant lequel les rĂ©cits sur les batailles du ProphĂšte ont vu le jour. De plus, un examen des sources islamiques montre que ces rĂ©cits sont remplis dâincohĂ©rences, de lĂ©gendes en tous genres et de contradictions qui doivent nous amener Ă considĂ©rer leur historicitĂ© avec la plus grande prudence. NĂ©anmoins, il parait incontestable que Muhammad a menĂ© des opĂ©rations militaires dans le Hedjaz afin de consolider sa domination politico-Ă©conomique. De plus, les incursions menĂ©es par Muhammad en Palestine sont bien attestĂ©es dans les sources extĂ©rieures. Dans cette section consacrĂ©e aux batailles de Muhammad, nous passerons au crible plusieurs de ses grandes opĂ©rations militaires (il nâest Ă©videmment pas question de traiter lâensemble des batailles). On sâintĂ©ressera en particulier aux motivations de ces opĂ©rations â telle quâelles ressortent en tous cas des sources â ainsi quâĂ la question de leur lâhistoricitĂ©.
Références
1â Voir notre article : Le Muhammad historique, « Les sources littĂ©raires islamiques ».
2â Adrien de Jarmy, « Dating the Emergence of the Warrior-Prophet in MaghÄzÄ« Literature », in Denis Gril et al., The Presence of the Prophet in Early Modern and Contemporary Islam, volume 1, The Prophet Between Doctrine, Literature and Arts: Historical Legacies and Their Unfolding, Brill, 2022, p. 80.
3â Robert G. Hoyland, Seeing Islam As Others Saw It: A Survey and Evaluation of Christian, Jewish and Zoroastrian Writings on Early Islam, The Darwin Press, 1997, p. 555.
4â Sean W. Anthony, « Muáž„ammad, the Keys to Paradise, and the Doctrina Iacobi: A Late Antique Puzzle », Der Islam, vol. 91 (2), 2014, p. 263.
5â Alfred-Louis de PrĂ©mare, Les fondations de lâislam. Entre Ă©criture et histoire, Seuil, 2002, p. 148.
6â Adrien de Jarmy, art. cit.
7â Patricia Crone, Meccan Trade and the Rise of Islam, Gorgia Press, 1987, p. 223.
8â Adrien de Jarmy, art. cit., p. 96.
9â Ayman S. Ibrahim, The Stated Motivations for the Early Islamic Expansion (622â641). A Critical Revision of Muslimâs Traditional Portrayal of the Arab Raids and Conquests, Peter Lang, 2018, p. 10.
10â Par exemple : Nombres 31:3, Exode 17:8. Voir cependant les paroles attribuĂ©es Ă JĂ©sus en Matthieu 26:52 : « celui qui vit par lâĂ©pĂ©e pĂ©rira par lâĂ©pĂ©e ».
11â Alain Ducellier, ChrĂ©tiens d’Orient et Islam au Moyen Ăge : (VIIe-XVe siĂšcle), Armand Colin, 1996, p. 159.
12â Voltaire, Essai sur les mĆurs et lâesprit des nations, citĂ© par Normal Daniel, Islam et Occident, Le Cerf, 1993, p. 367.
13â Hichem DjaĂŻt, al-Fitna : jadaliyat al-dĂźn wa as-siyĂąssah fĂź al-IslĂąm al-mubakkir, Beyrouth : DĂąr al TalĂźâa, 1991, p. 28.
14â John M. B. Jones, « The chronology of the Maghazi – a textual survey », in Uri Rubin (ed.), The Life of Muhammad, Routledge, 1998, pp. 193-228.
15â Tariq Ramadan, Muhammad. Vie du ProphĂšte, Presses du ChĂątelet, 2006, pp. 149-150.
16â AbĂ» á¶AbdullĂąh al-QurtubĂź, al-JĂąmiâ li-ahkĂąm al-QurâĂąn, vol. 2, p. 27.
17â Muslim 22.
18â Ayman S. Ibrahim, op. cit., p. 99.
19â Ibid, pp. 70-71.
20â Al-Tabari, Tarikh al-Rusul waâl muluk, vol. 3, p.1285.
21â Ibn HichĂąm, al-Sirah al-Nabawiyyah, vol. 2, p. 715.
22â Ibid.
23â Al-Bukhari 3029 ; Muslim 58. Lâadage prophĂ©tique a Ă©tĂ© repris par le terroriste Mohamed Merah lors des attaques de Toulouse et Montauban. Ce dernier a en effet dĂ©clarĂ© avant dâĂȘtre abattu par le Raid : « ce nâest pas lâargent le nerf de la guerre, câest la ruse ! ». Voir Patricia Tourancheu, « Conversation secrĂšte entre Merah et la DCRI », LibĂ©ration, le 16/07/2012 : https://www.liberation.fr/societe/2012/07/16/conversation-secrete-entre-merah-et-la-dcri_833718/
24â Al-Bukhari 2541.
25â Muslim 1745. Voir sur ce point Ibn Hajar, Fath Al-Bari Sharh Sahih Al-Bukhari, vol. 6, p. 147.
26â Muslim 523.
27â Al-Tabari, JĂąmiâ al-BayĂąn âan TaâwĂźl Ăąy al-QorâĂąn, DĂąr al-MaâĂąrifqura, vol. 13, p. 429, sourate 8 verset 12.
28â AbĂ» YaâlĂą, Musnad 7285. Al-Haythami a dit : « rapportĂ© par Abou Yaâla et at-TabarĂąni, par lâintermĂ©diaire de Mohammed bin âAmrou bin âAlqama et son hadith est hassan. Le reste des hommes dâat-TabarĂąni sont des hommes sĂ»rs », voir Majmaâ az-ZĂąwaid wa-Manbaâ al-FawĂąid, Maktaba al Qoudsi, 1994, vol. 6, p. 16, n° 9813.
29â Nous reparlerons plus en dĂ©tail de ces rĂ©cits dans nos futures publications.
30â Al-Tabari, Tarikh, op. cit, vol. 3, p. 1493.
31â Christian J. Robin & Paul Yule, « Himyarite Knights, Infantrymen and Hunters », Arabia, vol. 3, 2005-2006, p. 265 sqq.
32â Ibn Saâd, Tabaqat al-Kubra, vol. 1, p. 1580.
33â Al-Bukhari 3507.
34â An-Nasaâi 3143.
35â Muslim 1917.
36â Pascal Payen, La guerre dans le monde grec, VIIIe-Ier siĂšcles av. J.-C., Armand Colin, 2018, ch. 9.
37â Al-Tabari, Tarikh, op. cit., pp. 1440-41. Cette narration fait curieusement penser au mythe du Cyclope dans lâOdyssĂ©e dâHomĂšre. Selon le rĂ©cit bien connu, Ulysse rentre dans la grotte du cyclope PolyphĂšme. Ce dernier Ă©tant endormi, Ulysse enfonce un pieu dans lâĆil valide du cyclope. Il y a tout lieu de penser queâil sâagit lĂ du modĂšle du rĂ©cit narrĂ© par al-Tabari.
38â Ibid, vol. 1, pp. 1782-83.
39â Brannon Wheeler, Mecca and Eden. Ritual, Relics and Territory in Islam, The University of Chicago Press, 2006, p. 39.
40â Al-Bukhari 2818.
41â Ludvik Kalus, « Couverture fascicule TrĂ©sors militaires d’Istanbul. Rencontre entre l’Islam et l’Occident Ă la fin du Moyen Ăge », Comptes rendus des sĂ©ances de l’AcadĂ©mie des Inscriptions et Belles Lettres, 1988, pp. 172-73.